Emmanuel BENAZERA, ancien chercheur au CNRS et ingénieur de recherche à Inria, a effectué une transition audacieuse de l’univers académique vers l’entrepreneuriat. Après avoir passé 10 ans dans le milieu universitaire et scientifique, une thèse au CNES sur l’automatisation des sondes pour l’espace profond, il s’expatrie aux États-Unis et devient chercheur à la NASA. Ces expériences ont façonné sa vision de la recherche et du développement de logiciels. À son retour en France, et après un bref retour dans le secteur public, il fonde JOLIBRAIN pour transformer la recherche en intelligence artificielle en solutions concrètes pour l’industrie.
JOLIBRAIN se distingue dans le paysage de l’IA par son engagement envers l’open source et sa capacité à créer des applications réelles et robustes. Spécialisée dans l’apprentissage profond, la visualisation de données, et plus encore, JOLIBRAIN sert une clientèle variée, des géants de l’aérospatiale aux startups en hardware d’IA.
De l’espace à l’IA
“Ma génération a été biberonnée à Albator et Goldorak, l’espace m’a naturellement attiré ! Dès le début de ma carrière, j’imaginais passer le reste de ma vie dans ce domaine. Le seul aspect qui me manquait, c’était de pousser encore plus loin les limites de mes recherches. J’ai eu cette opportunité lorsque, après ma thèse, j’ai été embauché par la NASA, réalisant ainsi mon rêve d’enfance. Je me suis alors rendu aux États-Unis où j’ai commencé à travailler avec eux entre 2003 et 2006, une période marquée par les missions des rovers martiens Spirit et Opportunity.”
Les origines de JOLIBRAIN
“Après mon retour de la NASA, je suis retourné au CNRS, où j’ai constaté les limites de la recherche académique, le manque de moyens, l’inertie du secteur public et j’ai démissionné. Des amis de longue date, devenus entrepreneurs, m’ont alors sollicité pour leur prêter main-forte. Ces amis, rencontrés durant mes années d’études, avaient eux-mêmes évolué pour devenir des chefs d’entreprise chevronnés, confrontés aux défis de la science naissante des données. Ils dirigeaient des startups, explorant à la fois les solutions techniques et les modèles d’affaires. Ils m’ont demandé de venir les aider, particulièrement sur le plan technique.
Ainsi, j’ai passé cinq à six ans à collaborer avec ce type d’entreprises, dont une où j’ai été nommé cofondateur. À l’époque, je ne comprenais pas vraiment ce que cela impliquait. On m’avait simplement dit que j’allais m’occuper de la Recherche et Développement, ce qui semblait logique pour moi.
Ce rôle m’a plongé dans le monde réel de l’entreprise, où le but n’est pas seulement de surpasser les travaux antérieurs mais de créer des solutions fonctionnelles qui répondent aux besoins du marché. C’était très différent de la recherche académique, où l’on se concentre sur l’avancement de la connaissance sans nécessairement considérer l’application pratique ou le modèle économique. »
« Cette période a également été une phase d’apprentissage intense pour moi. J’ai mené un projet open source à but non lucratif, une sorte de “Google décentralisé”, qui m’a permis de rencontrer de nombreux professionnels du secteur informatique, élargissant ainsi mon réseau et ma compréhension du paysage technologique global.
Finalement, ces années formatrices ont abouti à la création de JOLIBRAIN. Après un retour temporaire dans le secteur public, des contacts privés, qui se souvenaient de mes explications sur l’intelligence artificielle et l’apprentissage automatique, ont commencé à revenir vers moi avec des projets concrets. Très rapidement, j’ai été contraint de formaliser ma situation en créant une structure officielle – c’était la naissance de JOLIBRAIN. »
Le rôle d’OXINO
« Venir des laboratoires de recherche m’a donné l’habitude de gérer personnellement les démarches administratives, y compris celles liées au Crédit d’Impôt Recherche (CIR). Alors que la plupart des entreprises passent par des cabinets spécialisés, j’ai décidé de le faire moi-même, en tant que chercheur. Malheureusement, cela ne s’est pas bien passé. J’ai reçu un avis des impôts remettant en cause l’éligibilité de nos développements logiciels au CIR, prétextant que le logiciel est une création de droit d’auteur. Cela m’a surpris, et mon comptable a dû chercher la réglementation pertinente, qui indiquait que l’administration avait commis une erreur.”
Nous avons contesté cette décision, mais ils refusaient de nous octroyer le crédit d’impôt, qui représentait à l’époque 20 000€. C’était une somme significative pour nous, même si elle peut sembler modeste aujourd’hui. J’avais même le statut de Jeune Entreprise Innovante (JEI), ce qui aurait dû faciliter les choses. Face à leur intransigeance, j’ai dû engager une avocate spécialisée qui, après examen du dossier, a confirmé que nous étions dans notre bon droit. Elle a réussi à faire valoir nos arguments si efficacement que, en moins d’une semaine, j’ai reçu l’approbation et le remboursement du CIR. Cela dit, les honoraires de l’avocate, qui m’ont coûté 5000€, n’ont pas été remboursés par l’État (rires). Cela m’a fait réaliser l’injustice de la situation : sans les fonds nécessaires pour payer un avocat, j’aurais été incapable de défendre mes droits.
Après cette expérience, j’ai continué à gérer les démarches moi-même pendant encore un ou deux ans. Cependant, le manque de temps et les soucis précédents m’ont convaincu de l’utilité de passer par un cabinet spécialisé. Au début, j’étais sceptique à l’idée de travailler avec un cabinet. Je craignais qu’ils ne comprennent pas l’importance de la rigueur scientifique et technique de notre travail chez JOLIBRAIN, que cela devienne juste un autre dossier parmi d’autres pour eux.
Malgré mes réserves initiales, je me suis tourné vers OXINO sur recommandation. J’ai gardé un œil attentif sur leur travail et j’ai finalement été convaincu par leur expertise et leur approche. Chez OXINO, ils ont su voir des aspects que nous avions ignorés et ont ajouté une valeur significative à notre entreprise. J’ai maintenant toute confiance en leur capacité à gérer nos affaires fiscales et administratives efficacement. »
L’impact du Crédit Impôt Recherche sur le développement de l’entreprise
« Les deux ou trois premières années, ces financements étaient absolument cruciaux. Le résultat net de notre entreprise dépendait entièrement du Crédit d’Impôt Recherche (CIR). En fait, JOLIBRAIN n’avait recours à aucune subvention externe, nous financions donc 100% de notre recherche et développement grâce à ces crédits, ce qui réduisait nos coûts de financement de R&D à seulement 70%.
Dans la deuxième phase de notre développement, disons la deuxième moitié de notre parcours jusqu’à maintenant, l’effet du CIR a été différent. Il a principalement contribué à notre trésorerie, ce qui a deux impacts majeurs. D’abord, il a permis de lisser notre fonds de roulement, ce qui est crucial pour une entreprise comme la nôtre où les projets peuvent comporter de nombreuses incertitudes et prennent du temps à se concrétiser. Ce n’est pas comme dans les entreprises de logiciel traditionnelles où vous avez des revenus récurrents. Deuxièmement, cette trésorerie supplémentaire nous a permis de financer l’innovation et de soutenir des projets dont le retour sur investissement peut ne pas être immédiat ou garanti. »
Le Crédit Impôt Recherche pour limiter les risques de la R&D
“Notre expertise et la maturité de JOLIBRAIN dans les architectures de réseaux neuronaux profonds et les algorithmes de machine learning nous placent dans une position avantageuse pour explorer les opportunités des marchés émergents de l’IA. Nous utilisons des techniques avancées, telles que l’apprentissage par renforcement et l’apprentissage non supervisé, pour répondre à des besoins spécifiques dans divers secteurs industriels.
Notre approche est guidée par une rigueur scientifique, où chaque innovation est le résultat d’explorations méthodiques et de validations rigoureuses. Mais faire de la recherche représente une prise de risque non négligeable en termes de coûts, de ressources et de bénéfices potentiels. Heureusement, ces risques sont atténuables notamment grâce à des dispositifs comme le Crédit d’Impôt Recherche. Le CIR joue un rôle crucial dans la mitigation de ces risques financiers. Il nous permet de soutenir nos efforts en R&D, autorisant JOLIBRAIN à continuer à innover dans l’IA tout en maintenant une gestion financière saine. Grâce à cette aide, nous pouvons nous permettre d’expérimenter et de pousser les limites de la technologie.”