Fiscalité de la Propriété Intellectuelle : Les éditeurs de logiciels protégés par le droit d’auteur sont concernés.
La réforme du régime français d’imposition des produits de cession/concession de brevets était attendue depuis longtemps par l’OCDE, qui œuvre dans la mise en place de politiques publiques respectant des normes internationales.
La fiscalité des revenus issus des actifs de la propriété intellectuelle était au centre des débats depuis de nombreuses années, comme l’expose le rapport du 5 Octobre 2015 de l’organisation. Il y est ainsi question des effets négatifs des dispositifs alors en vigueur, et de l’importance d’inclure pleinement l’économie du numérique dans les prochaines politiques fiscales sur le sujet.
Également, les préconisations fortes de l’OCDE portent sur l’intérêt d’une politique publique favorisant la domiciliation de la R&D dans le pays de référence, afin d’être conforme à « l’approche Nexus ».
La loi de finance pour 2019 intègre ces changements majeurs de régime d’imposition (Article 238 du CGI) : les règles fiscales françaises sont désormais alignées avec les exigences internationales et suivent les recommandations de l’OCDE, autant sur le sujet de la territorialité des dépenses de R&D, que sur la prise en compte des acteurs du numérique.
IP BOX : Les grandes lignes
Depuis la loi du 12 juillet 1965, les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés bénéficiaient d’un régime de faveur concernant les produits de cession ou de licence de brevets et d’inventions brevetables. Jusqu’alors, seuls les revenus et plus-values issus des brevets étaient imposés à un taux d’IS de 15%, sans prendre en compte la localisation de la R&D (pays de référence, ou étranger).
Le nouveau dispositif (Article 238 du CGI), applicable depuis les exercices ouverts dès le 1er janvier 2019, est profondément revisité :
- Le taux d’imposition à taux réduit est de 10% sur les revenus éligibles. La nouveauté réside dans la notion de Revenu Net, à définir pour chaque actif de propriété intellectuelle concerné.
- Les actifs éligibles sont les brevets, les certificats d’obtention végétale, les inventions brevetables (pour les PME), et sont désormais étendus aux logiciels originaux protégés par le droit d’auteur.
- Le respect de l’approche Nexus est intégrée dans la méthode de calcul du revenu net : L’enjeu est de s’assurer que la PI et la R&D sont localisées au même endroit.
- Les dépenses de R&D sont désormais prises en compte, et sont définies par actif.
- Le régime est optionnel, et une segmentation des actifs éligibles est à définir et argumenter.
L’intérêt de ce nouveau régime se veut assez lisible : Localiser en France une R&D de qualité, aboutissant à la création d’actifs de propriété intellectuelle générateurs de revenus.
L’extension de ce dispositif aux éditeurs de logiciels permet de prendre en considération les revenus issus des contrats de licence, si la solution logicielle est protégée par droit d’auteur.
Application pratique et besoin de sécurisation
L’application de ce dispositif implique au contribuable de mettre en place en interne un process permettant de suivre pour chaque année l’ensemble des paramètres du dispositif, à savoir l’éligibilité dans le temps des actifs, le suivi de leurs revenus nets, et la cohérence du calcul du ratio Nexus entre chaque année.
En effet, le livre de la procédure fiscale oblige les entreprises à tenir une documentation permettant de justifier la détermination du résultat net soumis au taux réduit pour chaque actif. Le contribuable doit préparer un dossier technique et financier permettant de sécuriser la déclaration et de justifier son application dans le strict respect des règles fiscales en vigueur. La non présentation des pièces justificatives peut entrainer une pénalité de l’ordre de 5% du résultat net imposé à taux réduit.
Aussi, il est demandé aux éditeurs de logiciels de démontrer que le logiciel concerné remplit la condition d’originalité nécessaire à la couverture par droit d’auteur, comme indiqué dans l’article L.112-1 du code la Propriété Intellectuelle.
Il est donc fortement recommandé d’anticiper le sujet, afin d’opter pour les bonnes options en s’assurant d’une cohérence d’ensemble, et ce, sur le long terme.
Focus sur les éditeurs de logiciels : Les éditeurs peuvent bénéficier de ce régime favorable à l’innovation, comme toutes les autres entreprises en France, mais doivent redoubler de vigilance quant à la justification de la mise en application du dispositif. En effet, la Propriété Intellectuelle dans le monde du logiciel est souvent bien éloignée du statut très scientifique des brevets, car elle est soumise au droit d’auteur, régit par l’article L112-1 du code de la Propriété Intellectuelle.
Sources de l’article :
- https://www.oecd.org/fr/ctp/beps-expose-des-actions-2015.pdf
- https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000037987780&cidTexte=LEGITEXT000006069577&dateTexte=20190101
- https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000006278873&cidTexte=LEGITEXT000006069414&dateTexte=19920703
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